Aligner la politique enseignante sur la politique éducative - continuation

ENCADRÉ 2.1 : PLAN STRATÉGIQUE POUR L’ÉDUCATION DU GHANA POUR LA PÉRIODE 2010-2020 – DIMENSIONS DE LA POLITIQUE ENSEIGNANTE

Le cinquième Plan du secteur de l’éducation préparé par le Ministère de l’éducation s’appuie sur les plans précédents et sur l’analyse de leur mise en œuvre au moyen d’évaluations nationales, d’examens dudit Plan, d’une analyse sectorielle et de sources statistiques nationales. Le Plan reconnaît les liens avec d’autres politiques nationales et internationales en matière d’éducation et de développement, y compris une « politique de perfectionnement et de gestion des enseignants des niveaux précédant l’enseignement supérieur » datant de 2008, dans laquelle des stratégies très générales pour aborder les dimensions suivantes de la politique enseignante sont formulées :

  • amélioration de la condition du personnel enseignant grâce à un schéma de carrière qui associe des incitations à l’avancement professionnel ;
  • amélioration de la qualité des enseignants grâce à un plan de perfectionnement professionnel permanent axé sur les établissements ou groupes scolaires, y compris l’enseignement à distance pour tous les enseignants ;
  • rationalisation de l’offre et de la demande d’enseignants compte tenu des projections des besoins en enseignants au niveau infranational, conformément à la décentralisation de la gestion des enseignants ;
  • établissement d’un cadre de qualification et d’habilitation des enseignants fondé sur les normes et exigences définies par le Conseil national de l’enseignement ;
  • initiation obligatoire pour tous les enseignants débutants et formation continue régulière en milieu scolaire pour les enseignants en début de carrière afin d’obtenir un engagement à long terme en faveur de l’excellence éducative ;
  • amélioration de la gestion des enseignants par l’octroi de ressources et au moyen d’incitations pour la gestion des établissements scolaires locaux.

Les principes directeurs du Plan concernent l’amélioration de la qualité de l’apprentissage et de l’enseignement et la mise en place d’un service d’enseignement efficace et convenablement rémunéré, tandis que les objectifs stratégiques pour les enseignants du primaire et du secondaire sont notamment les suivants : améliorer la formation, le perfectionnement et l’affectation des enseignants et des chefs d’établissement (pour l’éducation de base, en particulier dans les zones défavorisées, en mettant l’accent sur les enseignantes), et veiller à ce que le service d’enseignement « permette une optimisation des ressources en termes de temps de contact avec les élèves ». Les objectifs portent sur la présence en classe et sur le temps de travail des enseignants, et l’évaluation des performances des enseignants et des chefs d’établissement est prise en considération. D’autres objectifs sont axés sur les économies de coûts, à travers le remplacement des bourses publiques destinées à la formation initiale des enseignants par des prêts, une intensification de l’enseignement à plusieurs niveaux, la suppression progressive du congé d’études pour perfectionnement professionnel en faveur de la formation à distance et une « rationalisation » des dépenses de personnel par l’élimination du personnel « fantôme » et « inutilisé ou sous-utilisé ». Les ratios élèves-enseignant devraient augmenter à tous les niveaux.

Même si ce Plan est conçu de toute évidence pour remédier à des problèmes propres au système éducatif ghanéen, il ne prend apparemment pas suffisamment en considération les questions relatives, notamment, aux incitations pour le recrutement et l’affectation, au perfectionnement professionnel global de tous les enseignants, à l’amélioration de l’équilibre du temps de travail et à d’autres facteurs influant sur la motivation et sur la professionnalisation des enseignants.

Pour plus d’informations : Gouvernement du Ghana, 2012 ;

Une politique enseignante constitue une importante composante d’une politique générale de l’éducation pour favoriser la qualité de l’éducation et réaliser la vision d’un pays : lorsqu’une politique enseignante est alignée sur la politique de l’éducation, les objectifs éducatifs sont renforcés ; lorsque les deux sont en inadéquation, la condition du personnel enseignant et la qualité de l’apprentissage en pâtissent. Les encadrés 2.2 et 2.3 résument deux approches très différentes.

ENCADRE 2.2 : OBJECTIFS EDUCATIFS ET POLITIQUE ENSEIGNANTE EN AFRIQUE DE L’EST

L’adoption des engagements du Cadre d’action de Dakar de 2000 en faveur des objectifs de l’Éducation pour tous (EPT) a contribué à stimuler des changements de politiques pour promouvoir l’enseignement primaire universel (EPU) au Kenya et en Tanzanie en 2002-2003. Les frais de scolarité ont été supprimés ou fortement réduits, ce qui a favorisé une augmentation considérable des inscriptions à l’école primaire. Les plans nationaux d’éducation se sont attelés dans les premières années aux questions du recrutement et de la formation des enseignants, du renouvellement des infrastructures et des changements en matière de financement. Toutefois, il n’existait pas de politiques enseignantes globales visant à relever de nombreux autres défis inhérents au recrutement, à la formation, à l’affectation et à la condition des enseignants, préexistants ou susceptibles de survenir grâce à la nouvelle politique éducative.

Les augmentations spectaculaires d’effectifs scolaires auraient eu une incidence sur la satisfaction professionnelle et la motivation des enseignants, dans la mesure où les effectifs des classes et les charges de travail ont augmenté, principalement dans les zones urbaines, tandis que les ressources sont devenues plus limitées, en dépit de l’appui de donateurs internationaux. Des ressources supplémentaires ont été largement utilisées pour accroître la capacité de scolarisation sans répondre directement aux besoins matériels et professionnels des enseignants.

En Tanzanie, un renforcement du recrutement des enseignants était prévu, mais les objectifs en matière de nouvelles recrues étaient proportionnellement inférieurs aux taux très importants de scolarisation visés et, en tout état de cause, n’ont pas permis d’atteindre les buts escomptés au fil du temps (augmentation de 50 % du nombre d’enseignants contre une augmentation de 100 % de la scolarisation). Les gels d’emplois publics ont entraîné le désistement de certains enseignants formés, qui se sont tournés vers un autre emploi. Les classes à double rotation et l’enseignement à plusieurs niveaux, dont l’augmentation a compensé la pénurie d’enseignants et de salles de classe, ont entraîné une baisse des performances des enseignants. Les augmentations prévues en matière de logements pour les enseignants ont été partiellement réalisées, mais n’ont pas été suffisantes pour surmonter les pénuries d’enseignants affectés dans les zones rurales. Le VIH a également eu des répercussions sur la dotation en personnel enseignant. La formation initiale des enseignants a été raccourcie et les améliorations prévues pour le perfectionnement professionnel dans le cadre du service n’ont pas pu combler les pénuries en raison de pressions financières ou logistiques. Cette situation a eu une incidence négative sur la formation des enseignants à des techniques d’enseignement/d’apprentissage plus efficaces, principalement pour les classes à effectifs plus importants.

Dans l’ensemble, la situation générale de la profession enseignante s’est encore détériorée par rapport aux autres professions. De fait, le recrutement de candidats à l’enseignement mieux qualifiés continue de poser problème. Dans le même temps, alors que les indicateurs de l’apprentissage de base se sont améliorés, il n’en est rien pour les apprenants pauvres et défavorisés, une stagnation persistante étant enregistrée au niveau du premier cycle du secondaire. L’absence de politique enseignante plus détaillée au titre des objectifs ambitieux (et efficaces) en matière d’accès a entravé la réalisation des objectifs en matière de qualité.

Pour plus d’informations : Bennell, 2011 ; Bennell et Akyeampong, 2007 ; Mbelle, 2008 ; Nordstrum, 2013 ; République Unie de Tanzanie, 2006 ; UNESCO, 2014a : 203-206.

ENCADRE 2.3 : OBJECTIFS EDUCATIFS ET POLITIQUE ENSEIGNANTE « DE FAIT » EN FINLANDE

La politique finlandaise relative à l’éducation et aux enseignants reçoit systématiquement d’excellentes notes dans les évaluations internationales relatives à l’apprentissage, ce qui met en évidence l’importance de l’intégration de la politique enseignante aux objectifs éducatifs généraux en matière d’apprentissage individualisé et de réussite pour tous les apprenants.

Au sens strict, il n’existe officiellement aucune politique enseignante : la « politique » enseignante a été établie par défaut depuis plusieurs années grâce à la promotion de normes très élevées en matière de formation initiale (diplôme de Master) pour occuper un poste d’enseignant dans les établissements scolaires finlandais, ainsi qu’à l’obligation pour tous les enseignants de se perfectionner professionnellement de façon régulière. La formation initiale et le perfectionnement professionnel permanent sont entièrement financés par le Gouvernement. Un diplôme obtenu à l’université est un préalable nécessaire pour enseigner – il n’existe pas d’autres voies d’accès à un poste d’enseignant. Les programmes de formation et de perfectionnement professionnel des enseignants mettent l’accent sur leur apprentissage par la recherche et sur l’approfondissement de leur connaissance des contenus et des stratégies pédagogiques pour le niveau éducatif envisagé.

Par conséquent, à titre individuel ou par l’intermédiaire de leur syndicat, les enseignants jouissent d’un degré élevé d’autonomie dans leurs salles de classe en ce qui concerne les méthodes d’enseignement, les supports et l’évaluation des apprenants, et d’importantes possibilités de participation aux décisions concernant les programmes d’enseignement locaux et les réformes de l’éducation nationale. Il existe un degré élevé de professionnalisme, renforcé par la confiance dans les compétences et aptitudes des enseignants. Il n’existe aucune évaluation externe : les évaluations et progrès des enseignants font l’objet de consultations annuelles entre eux-mêmes et leur chef d’établissement. La rémunération et les conditions de travail des enseignants sont définies par des conventions collectives nationales. La rémunération n’est pas sensiblement supérieure à la moyenne nationale et est comparable à celle des autres professions. Le temps de travail en classe est peu élevé par rapport aux autres pays de l’OCDE, ce qui permet de consacrer davantage de temps à la préparation des enseignants et à l’évaluation des apprenants.

Il en résulte une politique de fait, qui valorise grandement l’enseignement sur le plan professionnel et encourage les meilleurs diplômés du secondaire à postuler pour l’enseignement : seul un candidat sur dix est retenu pour les programmes de formation des enseignants du primaire.

Pour plus d’informations : Conseil national finlandais de l’Éducation, 2014 ; Sahlberg, 2010.

Le tableau 2.1 présente des exemples d’alignement de certaines dimensions d’une politique enseignante sur un plan d’éducation, inspirés de la Recommandation de l’OIT et de l’UNESCO concernant la condition du personnel enseignant, du Cadre d’analyse de la qualité de l’enseignement général (GEQAF) de l’UNESCO et du Manuel des bonnes pratiques en matière de ressources humaines dans la profession enseignante de l’OIT. Note de bas de page 4

TABLEAU 2.1 : LISTE  DE  CONTROLE  POUR  L’ALIGNEMENT  DE  LA  POLITIQUE  ENSEIGNANTE  SUR  LA  POLITIQUE  EDUCATIVE
Politique éducativePolitique enseignante
Assurer une éducation de qualité pour chaque enfant/apprenant – objectifs fixés au niveau national :
  • Taux de scolarisation maximal pour l’éducation de la petite enfance (EPE)
  • Taux brut de scolarisation et de passage au degré supérieur de 100 % pour l’éducation primaire (de base)
  • Taux maximal de scolarisation et de passage au degré supérieur pour le secondaire
  • Taux d’alphabétisation de 100 % à l’échelle nationale
  • Projections démographiques pour guider les prévisions de scolarisation
Effectifs suffisants d’enseignants qualifiés pour chaque niveau éducatif :
  • Besoins de recrutement actuels et futurs/projections pour l’avenir
  • Normes d’admission à l’enseignement par niveau éducatif
  • Projections de recrutement/profil d’enseignant (zones urbaines, rurales et défavorisées, populations minoritaires, hommes et femmes)
  • Départs d’effectifs : projections liées aux retraites, cas dhe maladie, cas de décès, raisons professionnelles et personnelles
Programmes d’enseignement nationaux et/ou directives à l’intention des autorités éducatives décentralisées concernant les choix de programmes d’enseignement pour atteindre les niveaux de compétence escomptés des apprenants à l’obtention du diplôme sanctionnant la fin de chaque niveau éducatif:
  • Méthodes pédagogiques recommandées pour atteindre les objectifs d’apprentissage
  • Révisions des programmes d’enseignement actuels/antérieurs pour atteindre les objectifs de la réforme de l’éducation
Formation initiale des enseignants, certification et programmes de perfectionnement professionnel permanent pour obtenir les résultats d’apprentissage escomptés :
  • Profils de compétences et d’aptitudes des enseignants
  • Niveaux de qualification et dérogations autorisées
  • Critères et procédures de certification/d’habilitation
  • Exigences et programmes de perfectionnement professionnel pour tous les enseignants
  • Profils, connaissances et qualifications des formateurs d’enseignants
  • Suivi, évaluation et révision de la formation des enseignants
  • Accès au PPP pour tous les enseignants
Financement du système éducatif :
  • Objectifs pour l’investissement des ressources aux niveaux national, régional et local – pourcentage du produit intérieur brut (PIB), contributions du secteur public et dépenses publiques par niveau éducatif
  • Investissements/contributions du secteur privé, notamment des familles et des particuliers
Financement de la formation et de l’emploi des enseignants :
  • Investissements pour la formation initiale et le recrutement des enseignants
  • Financement nécessaire au PPP tout au long de la carrière pour tous les enseignants
  • Rémunération et incitations favorisant le recrutement, l’affectation et la rétention des enseignants, y compris la sécurité sociale
  • Dispositions et/ou normes de l’État pour les enseignants du secteur privé
Organisation et gouvernance de l’éducation :
  • Combinaison de dispositions publiques et privées – normes et réglementation
  • Coordination centralisée ou décentralisée de l’organisation pour la cohérence entre les niveaux éducatifs
  • Structures de gestion de l’éducation pour assurer l’efficacité et la définition des objectifs
  • Direction des établissements scolaires pour les résultats d’apprentissage
  • Participation des parties prenantes à la politique et à la gouvernance
Gestion et accompagnement des enseignants :
  • Normes, procédures, autorités/organismes responsables des dimensions de l’enseignement
  • Coordination entre les niveaux national, régional et local sur les dimensions de l’enseignant
  • Programmes de développement et d’accompagnement de la direction des établissements scolaires
  • Mécanismes de dialogue social sur les conditions d’enseignement
  • Mécanismes de dialogue sur les dimensions de l’enseignant
Environnement et conditions d’apprentissage :
  • Nombre de jours et d’heures d’enseignement exigés
  • Normes pour les rapports élèves/enseignant (REE)
  • Règles et dispositions pour des établissements scolaires sûrs et sains
  • Construction/rénovation des établissements scolaires/salles de classe
  • Fourniture d’outils et de matériel d’aide à l’apprentissage
Conditions pour un enseignement et un apprentissage efficaces :
  • Nombre d’heures d’enseignement nécessaires, présence des enseignants dans les établissements scolaires, planification, préparation, travail en collaboration, perfectionnement professionnel, consultations avec les parents
  • Normes en matière d’effectifs des classes
  • Soutien auxiliaire aux enseignants/paraprofessionnels
  • Supports et équipements pédagogiques fournis
Évaluation des performances du système éducatif :
  • Services d’inspection nationaux, régionaux ou locaux qui doivent évaluer les performances et recommander des changements
  • Rôles des associations/conseils/organismes professionnel(le)s en matière de normalisation et d’examen
Responsabilisation des enseignants : évaluation, rôles et responsabilités
  • Droits, rôles et responsabilités des enseignants établis et procédures d’application, y compris les mécanismes disciplinaires
  • Normes et procédures d’évaluation des enseignants
  • Exigences de perfectionnement professionnel ou possibilités d’amélioration des performances

2.1.2 Aligner la politique enseignante sur la politique éducative

2.1.3 La politique enseignante à tous les niveaux éducatifs et selon les priorités éducatives