Semaine 3 Identifier et diagnostiquer l’autisme

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5. Défis pour le diagnostic

5.1. L’autisme au féminin

Les estimations de la prévalence de l'autisme chez les hommes sont systématiquement beaucoup plus élevées que chez les femmes : selon quelques estimations quatre fois plus d'hommes que de femmes sont diagnostiqués. Cette disparité homme / femme peut même atteindre 10 : 1 si l’on considère seulement les hommes et femmes présentant un autisme sans déficience intellectuelle. De nombreuses recherches sont en cours concernant les facteurs génétiques et biologiques qui pourraient expliquer cette susceptibilité plus importante d’autisme chez les garçons. Mais de plus en plus de données probantes montrent que des diagnostics d’autisme chez les filles ont été manqués.

Les experts pensent que les caractéristiques de l’autisme chez les filles et les femmes ne correspondent pas nécessairement au stéréotype d’intérêt obsessionnel pour les machines et autres systèmes physiques, couplé avec un retrait social manifeste. Les filles sur le spectre de l’autisme peuvent avoir plus d’intérêts « typiquement féminins », tels que la mode ou la fiction, de telle sorte qu’un intérêt obsessionnel inhabituel pour le sujet, ou une façon inhabituelle de s’y investir, passe inaperçu pour les parents et les pairs, particulièrement chez les filles intellectuellement douées. À travers un intérêt pour le comportement des autres personnes et / ou un important désir de conformité, les filles peuvent faire tout leur possible pour apparaître sociables, imitant le comportement de leurs pairs. Ceci est bien illustré dans cet extrait issu de l’autobiographie de Liane Holliday Willey :

Ma mère me dit que j’étais très bonne pour capturer l’essence et la personnalité des gens. Par moments, je copiais littéralement les apparences et les actions de quelqu’un. J’avais une rare capacité à copier les accents, les inflexions vocales, les expressions faciales, les mouvements des mains, la démarche et les petits gestes. C’était comme si je devenais la personne que j’étais en train d’imiter.

(Willey, 1999, p. 22)

En fait les hommes et les femmes autistes peuvent tous deux faire des tentatives élaborées pour camoufler leur autisme dans le but de surmonter leur sentiment d'isolement et de différence (Mandy 2019). Cependant, ce phénomène de camouflage ou masquage semble être particulièrement fréquent chez les femmes (Hull et.al. 2020). Même lorsque les parents parlent de leurs inquiétudes aux professionnels, par exemple parce que leur fille est extrêmement difficile pour ce qui est de la nourriture, l’autisme peut être rejeté car d’autres domaines du comportement de l’enfant ne « rentrent pas dans les cadres ». Un nombre grandissant de femmes reçoivent un diagnostic à l’âge adulte, parfois après des traitements pour un trouble associé, tel que la dépression ou l’anorexie. Les experts se demandent si les outils de diagnostic doivent être adaptés pour être plus « neutres » en matière de genre. Néanmoins, il est peu probable que les diagnostics manqués seules expliquent tout l’excès marqué d’hommes par rapport aux femmes sur le spectre de l’autisme. Cela suggère qu’il existe également un risque biologique plus important chez les hommes.
Voir Lai et al. (2015) pour une revue des données probantes et des idées abordées dans cette section.