Semaine 5 Répondre aux défis : outils d’intervention

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3. Interventions

3.2. Intervenir sans preuves

De temps en temps, des interventions destinées aux personnes autistes sont proposées avec une justification étrange ou peu convaincante, peu ou pas de preuves, et souvent avec des revendications de succès grossièrement exagérées. Les parents d’enfants autistes peuvent être très vulnérables à ces promesses de « remède », de « guérison » ou d’atténuation spectaculaire de symptômes.  Naturellement, ils se sentent également responsabilisés en faisant tout ce qu’ils peuvent pour aider leur enfant, ne serait-ce que sur le principe de « tout essayer si cela peut aider ».

L’une de ces « thérapies », connue sous le nom de chélation, part du principe que l’autisme est causé par la présence excessive de toxines dans le sang, telles que le mercure et le plomb. La chélation implique l’administration de substances pour éliminer les « substances toxiques excédentaires » de la circulation sanguine. Cependant, la chélation s’est avérée avoir de très dangereux effets secondaires et, en 2005, un enfant autiste qui avait été traité par chélation est décédé d’un arrêt cardiaque. En 2013, l’Institut National pour l’Excellence en Santé et en Soins (NICE, acronyme anglais pour National Institute for Health and Care Excellence) a publié la déclaration suivante :

Ne pas utiliser [la chélation] pour gérer l’autisme, quel que soit le contexte, chez les enfants et jeunes personnes.

(National Institute for Health and Care Excellence, 2013)

En l’absence de preuve de l’efficacité et de la sécurité, la Haute Autorité de Santé (HAS) indique, dans son rapport de bonnes pratiques de 2012 (Recommandations HAS 2012), qu’elle ne recommande pas cette pratique en vue de diminuer les symptômes des personnes autistes.

Une autre approche, celle des enveloppements corporels humides (dit packing), a longtemps été proposée en France, mais pas dans les autres pays. Dans le packing, l’enfant est tout d’abord enveloppé dans des linges froids et humides, puis dans des couvertures pour réchauffer le corps. L’idée sous-tendue est que cette technique développe la conscience des limites du corps, qui, selon les tenants de cette thérapie, manque dans l’autisme. En l’absence de preuve de l’efficacité et de la sécurité de cette thérapie, son utilisation n’est pas recommandée. La HAS et l’ANESM (Agence nationale de l'évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux) se sont ainsi déclarées formellement opposées à l’utilisation de cette pratique (…) même restreinte à un recours ultime et exceptionnel » (Racommandations HAS 2012).

Ces deux techniques ne sont que deux exemples d’interventions n’ayant pas apporté la preuve de leur efficacité et de leur sécurité. La HAS en cite plusieurs autres dans son rapport de bonnes pratiques (par exemple : le régime sans gluten ou des substances comme le dextrométhorphane ou la famotidine…) (Recommandations HAS 2012).

Imaginez que vous ayez un enfant diabétique, et que quelqu’un vous offre un médicament jusque-là inconnu qui, selon lui, permet une guérison très efficace. Avant d’essayer un tel médicament, vous voudriez savoir comment et pourquoi la substance est censée fonctionner, vous auriez besoin de la preuve que l’efficacité de cette substance a été démontrée, et l’assurance que cela n’a pas eu d’effets secondaires néfastes ou dangereux. Vous voudriez également en savoir davantage sur la personne qui vante ce remède, par exemple savoir s’il a des intérêts financiers à le promouvoir. L’importance de répondre à de telles questions s’applique autant à l’autisme qu’aux traitements pour les maladies. Les interventions pour lesquelles le fondement théorique est peu clair, et qui manquent d’une évaluation formelle ou d’un contrôle éthique sont à éviter ou à considérer avec beaucoup de prudence.